Gilets jaunes, un an plus tard

Le mouvement des gilets jaunes, apparu en France le 17 novembre 2018, s’est exporté en Belgique, en particulier en Wallonie © Belga

Aujourd’hui, le gilet jaune broie du noir. Il y a un an, en France, mais aussi en Belgique, ce vêtement est devenu l’étendard de la contestation. 

Ce jour-là, il ne sait plus trop quand ni pourquoi, une main l’extrait du coffre où il est enfermé depuis de longs mois. Pour certains, cette main, c’est celle d’un Narbonnais de 36 ans, un certain Ghislain Coutard. Pour montrer sa colère et protester contre la flambée des prix des carburants en France, il décide d’arborer son gilet fluo. En un éclair, celui-ci passe de l’ombre à la lumière. Enfin, en un éclair… en une vidéo plutôt. Le 24 octobre 2018, sur le coup de 18 heures, Ghislain Coutard se filme avec son gilet et surtout son ras-le-bol. Au départ, il veut juste inviter ses amis sur Facebook à tout bloquer dans l’Hexagone un mois plus tard. Le soir même, 200.000 personnes l’ont vu et entendu.

Les gilets jaunes quittent l’obscurité des coffres et se font une place au soleil, sur les tableaux de bord des voitures et des camions. Seul au début, le petit blouson de toile légère rencontre d’autres semblables. «Qu’est-ce que tu fais là toi ? Moi ? Je ne sais pas. J’en avais marre de rester dans l’obscurité. J’avais beau supplier, dire que j’étais là pour attirer l’attention : personne ne m’entendait, c’était comme si je n’existais pas.» De simple bout de tissu réfléchissant, voilà notre gilet érigé en symbole de la contestation.

Et chez nous ? 

Est-il celui de Ghislain Coutard ? Aucune chance : celui que j’ai vu ce matin est belge. Dès lors serait-il celui d’un de ces contestataires qui s’installent en novembre sur les ronds-points de Wallonie et de Bruxelles, porte-voix de dizaine de milliers de personnes qui vivent dans la précarité et ont tant de mal à joindre les deux bouts en fin de mois ? Pas impossible. Celui de Maxime Deckers dit «Max le Belge», le premier gilet jaune à passer devant un juge à Liège en décembre ? Qui sait ? Celui de Roger, décédé accidentellement lors d’une action des manifestants sur l’autoroute E25 à hauteur de Visé ? Peut-être. C’est qu’en quelques semaines, les actions se sont musclées, prenant des allures d’insurrection à Paris notamment où chaque samedi, les Champs-Élysées deviennent champs de bataille.

Et après ?

Inédit, inclassable, le mouvement fait ses comptes en France un an plus tard : 11 morts, plus de 4.500 blessés, 20.000 arrestations, 2.000 condamnations. La Belgique est plus avare de chiffres. Les résultats obtenus ? Qui pourrait affirmer que le niveau de vie des plus démunis s’est amélioré ou que le fossé entre riches et pauvres s’est amenuisé ?

Ce qui est sûr, par contre, c’est que le président Macron n’a pas démissionné et que ce n’est pas sur cette question que le gouvernement belge est tombé.

Aujourd’hui, sur la banquette arrière de la voiture, le gilet gît, inerte et son jaune a pâli. Pourrait-il à nouveau briller demain ? Il n’oublie pas qu’un jour, il a suffi d’une main.

Le documentaire «Gilets jaunes : la fabrique de la révolte» est diffusé dimanche à 20h50 sur France 5.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici